mercredi 18 octobre 2017

Les bonnes vibrations de la méditation



Quand je me tourne vers mon passé de méditant, de nombreux souvenirs me reviennent, tous heureux…

Ma première retraite dans un monastère bénédictin, avec un moine dans la chambre à côté de la mienne qui ronflait tellement fort chaque nuit que les cloisons en vibraient… Les séances de printemps avec nos patients de Sainte-Anne dans les jardins de l’hôpital, pieds nus dans l’herbe, à écouter en pleine conscience la rumeur de la ville tout autour de nous, et l’étrange sentiment de fraternité universelle qui nous reliait alors … Mes larmes sereines lors de la sortie d’une retraite silencieuse de plusieurs jours, et l’émerveillement de pouvoir à nouveau parler et dialoguer…

Je suis émerveillé par ce paradoxe des pratiques méditatives : comment une démarche aussi simple (s’asseoir, observer le fonctionnement de son esprit et accueillir le monde en soi) peut avoir des conséquences aussi puissantes ? Comment ce détour par notre corps, cette attention prêtée au mouvement de nos pensées, et ce voyage intérieur immobile peuvent avoir un tel pouvoir de transformation ? Nous aider à mieux affronter nos souffrances, à mieux dépasser nos incohérences ? Et déclencher en nous, régulièrement, d’aussi bonnes vibrations ?

C’est d’autant plus étonnant que lorsqu’on apprend à méditer, on reçoit dès le début un enseignement à la fois important et déconcertant : commencer par ne poursuivre aucun objectif, et par lâcher ses attentes. 

Ne pas chercher à être cool, zen, détendu, ne pas chercher à faire le vide ou à léviter dans sa tête. Se contenter d’être là, présent, à observer les mouvements de son souffle, à ressentir tout ce qui se passe dans son corps, à écouter la rumeur du monde autour de nous, à  laisser filer ses pensées sans se laisser aspirer par elles. 

Cette démarche qui consiste à établir une qualité de présence intense et désintéressée, cette démarche de conscience ouverte et attentive est tellement inhabituelle qu’elle nous ouvre en fait des horizons insoupçonnés !

On me demande souvent si je n’en ai pas marre, parfois, de méditer ? « C’est quand même toujours un peu la même chose » me dit-on, « tu t’assieds sur ton banc, tu fermes les yeux, tu ne bouges pas pendant 20 minutes ; un peu barbant, non ? »

Ben, non ! Ce n’est pas barbant. J’ai même l’impression que ce n’est jamais barbant. 

C’est un peu comme aller marcher dans la nature, ou randonner en montagne : on a beau l’avoir fait des dizaines ou des centaines de fois, on ne s’en lasse pas. Parce que ce n’est jamais exactement la même chose : chaque balade est différente, selon la saison, l’heure du jour, le ciel qu’il fait, l’endroit où l’on marche, l’état dans lequel on est. 

Et chaque méditation est différente, nourrie par tout ce que nous sommes en train de vivre et par tout ce qui se passe autour de nous. Quand on se balade, on ne marche pas seulement pour atteindre une destination particulière, mais aussi pour le plaisir de marcher. Et quand on médite en pleine conscience, c’est pareil : on ne cherche pas à atteindre un état quelconque, mais à se sentir vivant, présent, conscient. Tout commence par ça ; et à partir de ça, tout peut advenir.



Illustration : une vision un peu idéalisée de la méditation...

PS : ce texte reprend ma chronique du 19 septembre 2017, dans l'émission de mon ami Ali Rebehi, "Grand bien vous fasse", tous les jours de 10h à 11h sur France Inter.